• Une nouvelle fois ce soir j'ai attendu que l'inspiration me vienne. Est-elle venue ? Pendant un instant j'ai eu peur qu'elle m'ait quitté. Car comme tout créateur, je suis habité par une Muse. Et comme tout créateur, sans cette Muse, je serais condamné à errer sans fin dans un monde que je subirais et dont je ne serais pas l'architecte. Mais que fait donc cette Muse dont je ne saurais me passer ? Elle a plusieurs armes très efficaces. Elle me repousse, m'ignore, se moque de moi, considère que je ne la mérite pas. Mais quelle que soit l'arme, la conséquence est toujours la même. Elle me frustre. Elle me blesse. L'important n'est pas ce qu'elle est, mais ce qu'elle n'est pas, ce que je voudrais qu'elle devienne. Et, fort de ce désir, je m'arme de mes mots, car c'est par eux que j'espère la faire mienne. Dès lors, je n'écris plus pour moi, mais pour ma Muse. Et chaque phrase, je ne l'écris plus, je lui murmure à l'oreille. Et imaginer ses yeux toucher le fruit de mon âme est mon moteur. Et par mes mots, je m'affranchit du superflu et je cherche à mettre mon coeur à nu, à l'en débarrasser de tout ce qui l'entache, de tout ce qui n'est pas présentable. Ainsi grâce à cette Muse, j'avance, je m'élève. Mais, nourrie d'un sentiment aussi intense et explosif que la passion, cette adoration n'est que de courte durée. Et déjà je me lasse de ma Muse, la considérant indigne de ma folie. Mais la Muse a besoin d'être adorée pour survivre, et c'est à son tour, dans un élan d'instinct de conservation, d'essayer de me séduire. Et la Muse doit aiguiser son imagination, pour m'offrir quelque chose de nouveau et d'inattendu que j'aimerais adorer. Et ainsi, grâce à mes exigences toujours plus pointues, ma Muse avance et s'élève. Et sans cesse, nous dansons en virevoltant, sans jamais nous toucher. Et ensemble, en symbiose, nous construisons notre piste de danse loin des autres. Une nouvelle fois l'inspiration m'est venue. Une nouvelle fois elle a prit la forme d'un hommage à celle sans qui l'inspiration n'aurait pas de raison d'être. La boucle est bouclée.

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  •    Wilheim regardait la bâtiment en face de lui. L'écrasante chaleur du mois d'aout renforçait l'aura impressionnante qui s'en dégageait. Il jetta un rapide coup d'oeil à la forme sombre qui slalomait furtivement entre ses jambières d'ébonite.
    « _Ma chère Gallie, nous n'allons pas laisser le doute et la peur nous submerger si prêt du but ? Lui adressa-t'il avec un petit sourire en coin.
       La petite créature lui repondit par un petit cri, proche du miaulement, avec une saturation à peine prononcée lui donnant un très léger grain à la fois intrigant et appaisant, avant d'aller se blottir dans une des poches interieures aménagée à cet effet de son long manteau en cuir noir. Wilheim sourit de manière résolue en glissant sa main, tout juste dégantée pour l'occasion, dans sa poche et gratta quelques instants derrière les oreilles de Gallie, fermant les yeux et s'enivrant de la sensation bienfaisante et calmante que cela procurait au petit animal.
       Il fit le vide en lui, respira calmement, et reprit sa route sur le pont d'accès à l'entrée de la forteresse du Roi Lenaïk. Le pont s'étirait sur une centaine de mètres, enjambant le Fleuve Euslair, le plus long et large du continent. Sur quelques centaines de mètres, le Fleuve s'ouvrait en deux, comme un oeil, sur un îlot sur lequel était construite la forteresse. Wilheim ne reconnu sur le pont, pas plus que sur aucune autre construction du domaine par ailleurs, la griffe d'aucun tailleur de pierres ou architecte qu'il avait déjà rencontré. Les pierres avaient la couleur de la craie, ainsi que sa douce texture satinée, mais elles étaient aussi dures et solides que le diamant, et chacune d'entre elle était, en un endroit, frappée du Sceau de la Famille Royale: une spirale aux courbures anguleuses. S'il n'avait pas su que cette forteresse avait été construite plusieurs siècles auparavent, son propre jugement aurait indiqué à Wilheim qu'il était flambant neuf. Tout les cinq mètres, de part et d'autre du pont, croissaient des buissons aux branches rouges et au feuillages violacés impeccablement taillés. Wilheim ne les reconnu pas plus que les pierres, mais ces buissons lui imposèrent un profond sentiment de respect, certainement pas étranger aux esprits virevoltant dans les branches de certains qu'il jura apercevoir du coin de l'oeil, comme une fugace illusion insensée. Mais la détermination l'emporta à la fois sur la curiosité et sur l'émerveillement, et Wilheim mit toutes ses questions en suspend dans un coin de son esprit, les rangeant telles des parchemins dans une bibliothèque déjà richement fournie.
       Wilheim fouilla ses poches à la recherche de la missive qui l'amenait. Il apposa ses paumes sur son manteau, au niveau des premières poches situées sur ses pectoraux, et entreprit de palper chacune d'entre elles, jusqu'à sentir ce qu'il cherchait. On pu voir son visage refléter tour à tour les souvenirs de joies, de mélancolies ou de fiértés passées à mesure qu'il passait tactilement en revue le bric-à-brac qu'il rencontrait sous ses mains. Il prit également soin de ne pas déranger Gallie plus que par une légère caresse frollée en passant sur la poche qui l'abritait. Il sourit une nouvelle fois en réalisant que, comme bien souvent, ce qu'il cherchait était dans la dérnière poche qu'il explora. Il sortit la petite lettre au sceau de cire déjà rompu, et en extirpa le contenu. C'était une feuille d'un papier d'une blancheur immaculée, aussi souple que de la soie, à peine plus épaisse qu'une feuille de brique, et à peine moins résistante qu'une feuille d'acier. L'ecriture qui y était aposée d'une encre noire comme le jais était propre et régulière, chacune des lettres étant impeccablement caligraphiée dans le plus pur style gothique. Même le plus aguerrit des graphologues n'aurait pu en tirer plus que ce qu'elles écrivaient, tant leur froide perfection semblant être le fruit d'une machine et non d'un homme. Une frise d'une rigueur mathématique reprenant le Sceau Royal ornait tout le tour de la lettre, focalisant, comme si la qualité de l'ecriture n'avait pas suffit, encore d'avantage l'oeil du lecteur sur le message écrit en son coeur:

    « Chevalier Wilheim,

    Le roi Lénaïk Premier vous convie, par la présente, à un entretient particulier avec Sa Personne, au cinquième jour d'aout, dans la bibliothèque privée de ses appartements.

    Respectueusement,
    Sharlah'k, Scirbe Personnel de Sa Majesté; »


       Le message était certes succint et impersonnel, mais, s'il était déjà rarissime de pouvoir apercevoir le Roi, de son vivant, de ses propres yeux, on ne pouvait que se sentir honnoré qu'il daigne vous recevoir dans ses appartements, et de surcroît dans sa bibliothèque personnelle ! On racontait qu'elle renfermait des documents si précieux et rares que leur seule lecture pouvait apporter l'omniscience, l'omnipotence, ou la béatitude éternelle qui aurait fait sombrer l'esprit trop faible dans une folie contemplative le consummant juqu'à la mort. Laquelle survenait d'ailleurs très peu de temps après généralement, du fait que le lecteur, subjugué et confronté à ses propres faiblesses en oubliait de repondre à quelque besoin élémentaire nécessaire à sa survie. Wilheim ignorait pourquoi il avait été convié, et ses sentiments oscillaient de la fiérté à la crainte, en passant par les doutes, mais une fois de plus, il chassa toutes ses idées en caressant brièvement Gallie dans sa poche, qui eut un adorable petit frisson au contact de sa main.
       Wilheim n'était plus qu'à quelques mètres de l'entrée ouest de la forteresse lorsqu'il jetta un rapide coup d'oeil en bas du pont. La forteresse était reputée imprenable, et ce n'était pas la vision des gigantesques créatures aquatiques serpentiformes bardées de piques, dents, ou autres mortelles rejouissances dormant semi-immergées à quelques mètres du pont qui allaient faire mentir cette réputation. On voyait aussi quelques entités aqueuses aux formes vaguement féminines danser en riant sur la surface de l'eau. Elles venaient parfois tourmenter les monstres endormis d'une pichenette sur leurs nasaux, ce qui avait pour propriété de les reveiller et de les rendre hors d'eux. Les reptiles géants essayaient alors de briser les troubles paix entre leurs puissantes et redoutables mâchoires, mais toujours en vain, les entités étant bien trop rapide et agiles pour se laisser prendre. Ces dernières possedaient en outre l'etrange faculté de pouvoir revêtir la consistance de l'eau à volonté, pour se reformer qulques mètres plus loin, d'humeur plus tourmenteuse et espiègle encore. L'eau du Fleuve était d'une clareté que rien ne semblait pouvoir troubler, pas même les nombreux et variés animeaux fouisseurs tout affairés à fouiller la vase que l'ont voyait aussi distinctement que s'ils étaient à l'air libre. Les seuls endroits où l'on ne distingait pas le fond étaient les zones dont la surface était recouverte d'énormes plantes aquatiques plates arborant une fleur étrangement mobile, aux pétales altérnant le rouge, le noir et le blanc. Ces fleurs attiraient de nombeux insectes volants, ou autres oiseaux, par un enivrant parfum sucré portant l'exquise promesse d'un copieux repas. Une fois ces avides imprudents posés sur la fleur, celle-ci se réfermait sur eux, et les digérait quasi instantanément grâce au puissant acide qu'elle secrétait en son sein. Des nombreuses plantes filliformes ornaient également la berge non fortifiée du fleuve, elles étaient recouvertes d'épines acerrées et leurs têtes étaient terminées par un pinceau de poils collants dans lesquels venaient s'engluer et mourir de faim, faute de pouvoir s'en dépetrer, toute créature assez folle pour s'estimer digne de quitter la relative sécurité du milieu terrestre. Le Fleuve aimait voir chaque chose à sa place, et il oeuvrait activement à faire respecter cette lubbie.
       Wilheim se trouvait maintenant devant la porte d'entrée de la forteresse. C'était une lourde double-porte d'obsidienne dont chacun des imposants, et apparament immobiles battants, était estampillé d'un grand Sceau Royal stylisé entouré de cinq visages. La porte de gauche présentait un visage riant aux larmes; un visage souriant de manière rassurante; un visage à l'air surprit et interrogateur, un peu perplexe; un visage calme et stoïque; et un visage affichant une résolution déterminée. La porte de droite, quant à elle, présentait un visage en colère; un visage terrifié; un visage d'une profonde et touchante tristesse; un visage au sourire mesquin et diabolique; et un visage maccabre, innexpressif et anéantit. Wilheim avait déjà entendu parler de cette porte, et il savait qu'outre sa fonction essentielle de barrière de la forteresse, elle possédait deux roles plus subtilement symbolliques. Le premier était de rappeler aux visiteurs, amis comme ennemis, que l'on trouvait toujours ce que l'on venait chercher ici. Que l'on cherche une solution pacifique à un problème, ou plus béliqueuse. Le deuxième rôle était beaucoup plus curieux, et remontait à une tradition ancestrale de la lignée royale.
    Le Roi possédait, dans sa propre suite, un couple d'une espèce disparut d'insectes volants, appelés des « Mangeuses de Rêves », rendu immortel par quelque obscur sortilège connu uniquement des plus sages des Mages du Roi depuis des générations. Ces insectes, à l'espérance de vie réduite à deux jours, possèdaient un don étonnant, qui causa leur extinction. Leurs larves se nourrissaient exclusivement d'émotions humaines ressenties lors du sommeil, qui se cristallisaient dans leurs cocons, imprégant les futures Mangeuses de Rêves. Sortant de leur entraves de soie, elles cherchaient par tout les moyens à localiser une source de l'émotion prédominante baignées dans laquelle elles avaient grandie, avec une nette préférence pour celles émannant de l'humain cottoyé pendant leur état larvesque. Une fois leur cible trouvée, l'insecte se posait dessus et se consummait tout un jour et toute une nuit, irradiant l'émotion concernée autour d'elle, dans le but d'attirer un partenaire pour se reproduire. Au bout d'un jour et une nuit, si aucune autre Mangeuse de Rêves n'avait repondu à cet appel, la première était réduite en poussière, brulée par la passion.
       La première, et à ce jour seule, guerre qui secoua l'ensemble du continent fût d'une telle violence et d'une telle sauvagerie, que la douleur et la mort étaient pérceptibles quasi-physiquement, et hantaient les rêves de tous, quel qu'ait pu être leur camp. Aucun des territoires où pullulaient les Mangeuses de Rèves, qui étaient par nécessité ceux où pullulait l'Homme, n'avait été épargné. Un beau matin, tout les insectes sortirent de leur cocon et brulèrent sur place, donnant un journée sans ombre et une nuit sans obscurité. On racontait que nul être humain encore en vie de tout le continent ne fût épargné par la sensation de douleur intense qui rayonnait de l'ensemble des Mangeuses de Rêves mourantes applelant désespèrément un partenaire non moins occupé à mourir. Même les généraux les plus endurcis qui commandaient chacune des parties impliquées s'effondrèrent tous en pleurant comme des nourissons arrachés à leur mère en réalisant l'atroce et tangible réalité découlant de leurs ordres. Ainsi, la disparition de toute une une espèce permit une prise de conscience collective, sur la base de laquelle furent signés nombres de traités de paix, de pactes de non-agression, et d'accords visants à impliquer le minimum de non-combattants dans les conflits armés. Tout les ans depuis, à la même date, le 19 ème jour de mars, était célébrée la « Fêtes des Morts Ardents ». A cette occasion, de nombreux feux étaient allumés un peu partout sur le continent et étaient maintenus en flamme un jour et une nuit durant. En cette date, les gens rendaient positivement hommage à leurs morts tombés sous la cruauté du combat, par d'interminables banquets dansants bien arrosés.
       Toujours est-il que les orbites vides de chacun des visages de la porte était enchanté avec chacune des émotions correspondantes prélevées sur le Monarque en fonction. Ainsi, chaque matin, dans la petite volière au barreaux épais comme des cheveux installée au chevet du Roi, le couple de Mangeuses de Rêves pondait un oeuf. Vers la fin de l'aprè-midi, une larve en sortait, qui se nourrissait toute la nuit des songes du Souverain et tissait un cocon au petit matin. Les premières rayons de soleil faisaient sortir une Mangeuse de Rêves adulte qui s'envolait à tire d'aile illuminer le visage reflétant le plus l'humeur de la journée du Roi. Grâce à cela, et même s'il était rare pour un habitant de Xeliandre, la Cité Royale, de rencontrer le Roi en personne de son vivant, nul ne pouvait nier connaître son état d'esprit, jour après jour.
    Wilheim ne sut s'il devait être rassuré ou inquiété de voir que c'était le visage surprit et interrogateur qui brulait. Mais son viage imita bientôt celui de la porte. La demi-douzaine de Gardes Personnels du Roi, l'élite des combattants du Royaume, qui assuraient leur tour de garde à cet instant, semblaient attendre Wilheim. Ils lui ouvrirent la porte en l'invitant à pénétrer l'enceinte de la forteresse à grand renfort de saluts révérencieux.
       Wilheim s'exectuta sans demander son reste, stupéfait.


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  • « Il était une fois, dans un monde cruel et perverti par le matériel et par la tendance schizophrène de ses habitants, un petit garçon heureux et insouciant qui vivait dans une bulle. Il ne manquait de rien, étant donné qu'il ne connaissait rien. Et il passa ainsi les premières années de sa vie dans sa bulle a se contenter de ce qu'il avait. Lorsqu'il avait froid des plumes douillettes lui poussaient sur le corps. Lorsqu'il avait soif, le plus délicieux de tous les nectars lui coulait le long de la gorge. Lorsqu'il avait faim, de bienveillantes fées lui amenaient des mets raffinés. Il avait aussi inventé un jeu, pour s'occuper, il se dissimulait derrière des rochers, ou des arbres, et ses fées devaient le trouver. Elles faisaient exprès de perdre bien sur, pour ne pas lui faire de peine. Et les années passèrent...

    Un jour, alors qu'il s'amusait avec ses fées, celles-ci s'envolèrent à tire d'aile. Il les regarda s'éloigner, surpris, ignorant que c'était la dernière fois qu'il les voyait. Soudain la plus horrible des choses que le petit garçon ai jamais entendu retenti a ses oreilles habituées au sons les plus apaisants. Et sa bulle vola en mille éclats de verre scintillant, se répandant dans l'épais gazon environnant. Un morceau, en tombant, lui blessa le pied. C'était la première fois que le petit garçon ressentait la douleur. Il ne comprenait pas. Il ne savait pas ce qui lui arrivait. Il se mit à pleurer.

    -Hé bien gamin, il ne sert a rien de pleurer comme ça !

    Un homme se tenait devant lui. Grand, effrayant, inamical, malodorant.

    Qui êtes vous ? demanda le petit garçon, d'une voix noyée dans les sanglots.
    -Je suis chasseur de fée mon p'tit, hé ouais, c'est mon gagne pain.

    Le petit garçon ne compris pas la plus traître mot de ce qui venait d'être dit. Il dévisagea un court instant l'homme avant de finalement lâcher :

    -Mon pied me fait mal pouvez-vous me guérir ?
    -Je peux te vendre un pansement, ou un peu de gnôle pour désinfecter tout ça.
    -Vendre ? Qu'est ce que cela signifie ?
    -Cela veut dire que je ne te donnerai quelque chose que si tu me donnes quelque chose en échange.
    -Mais je ne possède rien, et j'ai mal.

    L'homme tourna alors les talons et disparut dans la forêt.
    S'en était trop, le petit garçon ne comprenait plus rien. Il avait froid, il avait soif, faim et mal au pied. Il s'écroula. Il se remit à pleurer. Il se mit à pleuvoir.

    Son premier contact avec le monde extérieur venait de lui faire perdre son innocence.
    Il resta un long moment ainsi avant de comprendre qu'aucune plume ne lui pousserait plus ni qu'aucune nourriture providentielle ne viendrait à lui.

    Le petit garçon se releva, il avait changé, il était plus grand, plus fort, c'était désormais un garçon. Il fit quelque pas ; son pied lui faisait encore mal, mais la pluie avait nettoyé sa plaie.

    Il apprit vite à faire du feu pour se réchauffer et à cueillir des baies pour se nourrir. Mais bien vite, le garçon s'ennuya. Il voulait absolument quelqu'un avec qui parler et jouer. Il se résolut donc, et ceci malgré une première rencontre peu réjouissante, à partir à la recherche de ses semblables. Et il les trouva.

    Il avait enfin des gens avec qui parler et jouer. Certes il du travailler, car tout ce qui permettait de procurer du bonheur était a « vendre », mais ceci ne le dérangeait pas le moins du monde, et, bien qu'un peu plus méfiant, il ne boudait pas son plaisir de pouvoir jouir de plaisirs qu'il pensait a jamais perdus. Il était toujours gentil avec tout le monde, il aidait tout le monde du mieux qu'il pouvait, il faisait des sacrifices parfois pour faire plaisir à son prochain. Mais pour tout les gens qui le côtoyaient, le garçon n'était que le petit étranger venu de nulle part qu'il était facile d'exploiter. Rapidement, le garçon devint la source de raillerie provenant de ceux qu'ils considéraient comme ses amis, il ne restait avec eux que par peur de la solitude. Il s'accommodât de cet état de fait durant de nombreuses années, ce qui le changeât encore, il devint un jeune homme, de plus en plus grand et fort.

    Un jour, alors qu'il était seul en train de se lamenter sur son triste sort, il fit la plus incroyable de toutes les découvertes. Devant lui passa une jeune fille. Il en avait bien sur déjà vu, mais il était coutume chez ses « amis » de se moquer d'elles et d'élaborer les pires stratagèmes afin de leur compliquer la vie. Mais la, il ressentait quelque chose de nouveau, il trouvait qu'elle était très agréable a regarder, il avait envie de la serrer dans ses bras, et de rester ainsi jusqu'à la fin des temps. Il alla voir cette demoiselle et lui fit part de cette étrange chose qu'il ressentait. La demoiselle explosa de rire :

    -Mon pauvre, voyons, soyons sérieux, qu'aurait tu a m'offrir, toi l'étranger, toi qui ne ressemble pas aux autres, je n'ai pas envie d'être la source des ragots du village, que les gens me montrent du doigt !

    Sur quoi elle explosa de rire une nouvelle fois, et se hâta de s'en aller pour raconter tout ceci à ses amies. Ce qui rajouta a tout le monde des raisons pour se moquer du petit garçon. Il connu pour la première fois la honte. C'était la goûte d'eau qui fit déborder un vase qui n'était déjà trop rempli. Dans un élan de colère il jura en hurlant devant tout le monde que chacun paierait pour l'avoir fait souffrir, ce qui ne fit bien sur que raviver les railleries, et du coup, sa colère. Il ne pu retenir ses larmes plus longtemps et lorsqu'elles perlaient jusqu'à sa bouche, elles avaient un amer goût de rancune et de haine mêlés à une tristesse qui rendit toute chose insipide a ses yeux. Il quitta le village, sans même jeter le moindre regard sur ses camarades, qui eux, en revanche ne le quittait pas des yeux et pointaient leurs doigt accusateur sur lui. Il déambula ainsi ivre de colère pendant de long mois, des méchancetés plein la tête, se jurant solennellement de ne plus offrir son cœur a qui que se soit, chaque pas le rendant plus grand et fort que le précédant. Lorsqu'il s'arrêta c'était devenu un homme.

    Et il se trouvait devant un nouveau village, beaucoup moins joli que le précédent et aussi plus petit. Il s'en approchât d'un air méfiant encore une fois. Il avait jugé trop vite, certes les maisons étaient plus petites, mais leur intérieur était richement décoré. Il voyait du feu qu'il entendait par son imagination crépiter dans l'âtre. C'est alors que des gens l'aperçurent. Il eu peur de se faire chasser, ou exploiter encore, quoique vu sa nouvelle carrure, il n'aurai eu aucun mal a mettre le village a feu et a sang si il le désirait, cette idée ne lui parut pas désagréable d'ailleurs. Mais les gens lui sourirent et l'invitèrent à prendre un bol de soupe à l'intérieur, au coin du feu, au chaud, et ils ne semblaient rien vouloir en échange. La soirée suivait son cours et rien ne lui avait été demandé encore, la nuit bien sonnée on lui proposa même un lit, et on s'excusa de la taille de celui-ci !!!! L'homme dormi comme un bébé, il était heureux et dans ces rêves les fées de son enfances réussirent a le convaincre de ne plus en vouloir aux habitants de son ancien village. Et les années passèrent.

    Il était désormais l'un des chef de son nouveau village accueillant, qui s'était considérablement agrandit depuis ; et qui, était un des plus respectés de sa région. Il était aimé de ses amis, c'était d'ailleurs la première fois qu'il comprenait le sens de ce mot, et il les aimait en retour. Il était très heureux, et il ne souhaitait pour rien au monde que quoi que ce soit change. Il était bien sur devenu différent, moins naïf. Il ne manquait qu'une seule chose a son bonheur, et ce manque était lié a une blessure que personne ne semblait pouvoir guérir, malgré quelques tentatives peu fructueuses...

    En tant que l'un des piliers de son nouveau village, il était de coutume que l'homme se déplace pour entretenir de bonnes relations diplomatiques avec les villages voisins. Et il y eu de nombreux déplacements. Un jour il se rendit dans une région assez lointaine pour célébrer le jour de la naissance d'un de ces compagnons expatrié pour raison professionnelle. Il avait parfois entendu ses amis de la bas évoquer une demoiselle au nom angélique, mais il n'y prêta guère plus d'attention. Il se retrouva soudainement en face de cette demoiselle, qu'il vit sans voir pendant un moment. Puis, par jeu, l'ivresse aidant, ils se rapprochèrent. Il se trouva alors complètement stupide, comme de nombreuses années auparavant. Sa beauté le subjuguait, et la moindre minute qu'il ne passait pas en sa compagnie était pire que la morsure du verre dans son pied, c'est alors que, pour une raison inconnue, il la pris dans ces bras... Sa tête tourna violemment : l'odeur de la demoiselle, son contact délicat, la moindre des ses divines imperfections, s'insinuèrent en lui au plus profond de son âme, une étrange sensation l'enveloppa, il se sentait bien, en sécurité. Avant qu'il ne s'en rende compte, l'homme était redevenu un petit garçon innocent dans sa bulle. Pour la première fois de sa vie, le petit garçon compris le véritable sens du mot « bonheur », celui que l'on ne demande pas, qui ne s'échange pas, qui ne coûte rien et qui pourtant vaut tout l'or du monde, comme dans sa bulle, mais il ne pu l'apprécier qu'alors car il lui avait manqué. Il se résolut donc a mettre son cœur et toute son âme a nue sur un plateau et a l'offrir a la demoiselle. Mais le destin, bien farceur avec notre jeune ami une fois de plus, en décida autrement. Un autre homme s'attira les faveurs de la demoiselle, et alors que le petit garçon s'approchait d'elle pour lui donner le plateau, son rival le renversa et la demoiselle en piétina le contenu en s'approchant de celui vers qui son choix était allé. Le petit garçon senti son être se déchirer. Il ne comprenait pas plus la deuxième fois qu'on l'arrache à son monde parfait, que la première. Le petit garçon ravala sa colère, et préféra garder un minimum de dignité, aussi fit-il en sorte que personne ne soit au courant de l'impacte de cette rencontre sur lui. L'homme repris le dessus sur le petit garçon, et rentra chez lui, dépité et décidé de ne jamais laisser revenir le petit garçon pour quoi que ce soit, pour ne plus souffrir.

    Mais le petit garçon avait plus d'une corde à son arc et n'avait pas dit son dernier mot... »


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  • Ne pas avoir le choix. « Je suis désolé, je n'ai pas eu le choix. ». Quelles sont donc les vertus magique de ce « choix », que l'on a ou pas, et qui peut influer sur le cours d'une vie, et même de toute chose ? On se cache derrière ce bouclier pour justifier l'injustifiable. Pour ne pas avoir a avouer l'inavouable. Nous avons, par défaut, lorsqu'il s'agit d'une action, au minimum deux choix. Agir. Ne pas agir. Et chacun des deux peut être décliné en une multitude de sous-choix. Il en va de même pour la raison. Réfléchir. Ne pas réfléchir. Division en sous-choix. Chaque choix représente une direction, une grande route, et chaque sous-choix représente un chemin. Et si tout les trajets n'ont ni la même durée, ni la même distance, ni la même origine, en fonction du marcheur, tous mènent inexorablement au même endroit. Et les différents marcheurs conjecturent sur cet endroit. Ils imposent leur vision de cet endroit aux autres marcheurs perdus. Sont-ils plus savant que les autres ? Ont-ils eu quelque carte routière inaccessible aux autres ? Ils aiment à le clamer. En vérité je pense qu'ils sont terrorisés à l'idée de marcher seul. Et consciemment, ou inconsciemment, ils usent des plus fins stratagèmes pour marcher en compagnie du plus grand nombre. Et le plus grand nombre les conforte sur leur itinéraire. Ainsi passent ils la majeure partie du trajet à flatter mutuellement leur ego. « Regardez comme notre route est la plus sûr, la plus jolie, et la plus rapide. Regardez comme leur route est la plus dangereuse, la plus laide et la plus tortueuse ». Et ainsi ils passent la majeure partie de leur trajet à semer des déchets, convaincus que celui qui passera derrière les ramassera. Et celui qui passe derrière fais la même chose. Et ainsi de suite. Et les déchets s'accumulent lentement sur le bord de la route, et cachent le paysage. Et inévitablement, les marcheurs arrivent à destination. Y trouvent-ils ce qu'ils ont tant imaginer ? Je ne sais pas, et cela ne m'intéresse pas. Ou plutôt, je n'ai pas le temps de m'y intéresser. Je préfère emprunter les petits chemins qui semblent rebuter les autres marcheurs. Et je m'émerveille du paysage à peine maculé que je traverse. Et au lieu de perdre mon temps à imaginer la destination, je profite du voyage. La destination est inévitable. Le voyage est mon choix. Et je préfère qu'on dise de moi : « Il a marché seul et vu des choses que personne d'autre n'a vu », plutôt que « Il est bien arrivé, comme tout le monde »


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  • Une nouvelle fois je me gorge de ce sentiment. Une nouvelle fois tout mon être entre en résonance. Une nouvelle fois je veux serrez dans mes bras, goûter, habiter l'objet de mes désirs. Et une nouvelle fois mes seules compagnes sont cette page blanche que mon âme noircit pour se purifier, pour se décharger, et cette lancinante musique qui dresse chaque poil, chaque cellule de mon corps. La résonance. Quand toutes les choses qui vous plaisent et vous déplaisent s'accordent en une symphonie. La résonance. Qu'importent les joies, les peines, les ambitions, les déceptions, les réussites ou les échecs. La résonance n'est pas manichéenne. Ce qui se présente à elle, la résonance se l'approprie. Elle se gonfle, se distant, s'amplifie, se consolide, devenant plus avide, plus gourmande. Elle veut plus. Toujours plus. Mais, sans être paresseuse, la résonance va au plus offrant. Question de facilité? Question de rendement? La résonance n'en a cure. Que ce soit le travailleur à qui tout sourit, à force d'acharnement, qui touche du regard l'étendu de son pouvoir d'achat, constatant que sa seule limite est celle de l'horizon de son imagination. Que ce soit le junky roulant dans sa crasse et dans sa douleur, qui plante dans ses veines l'essence de cette douleur, qui sature en un bien être d'extase chimique. Moyens différents. Finalités identiques. Les deux ressentent. Les deux vibrent. Les deux  résonnent. Certains ont tenté de domestiquer cette résonance. De la codifier. Mais la résonance est sauvage, et la plier, c'est la corrompre. Ainsi les premières fausses notes ont infiltré la symphonie, couvrant de leur dissonance toutes les autres notes, les corrompant à leur tour. Et j'erre dans ce vacarme assourdissant. Et je vois mes semblables danser sur cette musique dont ils ignorent l'imperfection. Et tous ils résonnent, dérègles et convaincus. Mais ils n'en résonnent pas moins. Aussi respecté-je, sans m'y immerger, cette onde insalubre. Et j'y glisse, comme sur une pente de plus en plus abrupte. Et parfois je vois d'autres glisseurs. Et parfois certains me donnent de nouvelles cordes à faire vibrer. Le plus précieux des cadeaux à mes yeux. Car voilà bien l'essentiel. Qu'importent le bas de la pente, la couleur de l'eau ou les sons désagréables. L'essentiel, c'est de glisser, toujours plus loin, toujours plus vite, et surtout de résonner de plus en plus fort, pour rendre hommage à ces dons désintéressés. Ainsi nous résonnerons, et nous nous comprendrons. Et toi, objet de mes désirs, puisses tu à jamais résonner et envoyer tes cordes aux glisseurs en manque de vitesse...

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